Léonard Foujita

1886 (Japon) - 1968 (Suisse)

Portrait noir et blanc de Léonard Foujita

Biographie

Léonard Foujita, né le 27 novembre 1886 à Tokyo (Japon) et mort le 29 janvier 1968 à Zurich, est un peintredessinateur et graveur français d’origine japonaise, né d’un père médecin de l’Armée Impériale ouvert aux idées et à la culture occidentale. Il est également illustrateur, céramiste, photographe, cinéaste et styliste.

Inscrit aux cours de français dès l’école primaire, Tsuguharu étudie la peinture de style occidental aux Beaux-Arts de Tokyo, obtient son diplôme en 1910 et n’a qu’une idée en tête : visiter Paris. En 1913, il s’embarque finalement pour Marseille et débarque à Paris dans le quartier du Montparnasse le 6 août au matin. Il s’est engagé auprès de sa famille à revenir au bout de trois ans, notamment pour épouser sa fiancée Tomiko.

Le lendemain, le peintre chilien Manuel Ortiz de Zarate, qui l’aborde à la terrasse d’un café, l’entraîne chez Pablo Picasso qui provoque le premier grand choc de sa vie d’artiste. Les compositions cubistes et les peintures du Douanier Rousseau de l’atelier de Picasso le poussent à oublier ce qu’il sait et à se jeter à fond dans la bataille des Avant-Gardes de l’Art Moderne que livre une centaine d’artistes de son âge décidés comme lui à imposer leurs idées nouvelles à Paris.

Déjà bien avant la Première Guerre mondiale, l’École de Paris existe pour éclore tout à fait après 1918. Foujita en devient l’une des stars. Amedeo Modigliani, Jules Pascin, Hermine David, Moïse Kisling, Chana Orloff, Chaïm Soutine, André Derain, Maurice de Vlaminck, Fernand Léger, Juan Gris, Henri Matisse et, en général, tous ses voisins de Montparnasse, dont le peintre japonais Ruytchi Souzouki deviennent ses amis.

Après avoir résidé à l’Hôtel d’Odessa (en 1913), Foujita partage l’atelier de son premier ami japonais à Paris, Kawashima, dans une zone mal définie proche des fortifications au sud de Montparnasse. Ils suivent l’enseignement néo-grec de Raymond Duncan. Il hésite entre la danse et la peinture.

Après un séjour à Londres en 1914, il revient cité Falguière, près de Soutine et Modigliani, jusqu’à ce qu’il rencontre sa première femme, Fernande Barrey en 1917, et qu’il installe son atelier dans sa cour, au no 5, rue Delambre, où il restera jusqu’en 1924.

Sa première exposition personnelle chez Chéron en juin 1917 est un triomphe ; il expose 110 aquarelles dans un genre mi japonais, mi-gothique que Picasso admire. Avec ses gains, il offre un oiseau à Fernande, qui est à l’origine de cette exposition et installe chez eux une baignoire avec l’eau chaude courante, ce qui fait aussi le bonheur des modèles, dont la célèbre Kiki de Montparnasse, son modèle favori dont on admire toujours la beauté dans le fameux Nu couché à la toile de Jouy (musée d’art moderne de la ville de Paris). En odalisque alanguie, le nu de Kiki fait sensation au Salon d’Automne de 1922 et se vend pour l’énorme somme de 8 000 F.

En 1918, le poète et marchand polonais Léopold Zborowski entraîne Soutine, Modigliani et sa femme, Jeanne Hébuterne, avec Foujita et Fernande à Cagnes-sur-mer, pour s’abriter des bombes et vendre leurs peintures dans les palaces de la Côte d’Azur. C’est un moment fort pour Foujita qui peint avec ses deux amis pendant tout un été et qui rencontre Auguste Renoir juste avant sa mort.

Très rapidement, en particulier après ses trois premières expositions personnelles, Foujita connaît la gloire. Il est de tous les Salons de peinture, non seulement à Paris mais aussi à Bruxelles, en Allemagne, aux États-Unis et au Japon ; son nom et les photographies de ses exploits illustrent de nombreux articles de la presse nationale et internationale.

Alors que Fernande se détourne de lui, Foujita rencontre à la Rotonde Lucie Badoud, qu’il surnomme Youki (Yuki signifie « Neige » en japonais), à cause de la blancheur de sa peau ; elle devient non seulement sa muse mais aussi une égérie de Montparnasse. Ils sont de tous les bals et sont les stars des Années folles.

Le succès de Foujita tient à son style tellement original et nouveau qui le situe à la frontière de l’Orient et de l’Occident, dans un registre où il excelle. Ses sujets, de préférence occidentaux, sont dessinés avec sobriété et minutie sur des fonds ivoire de sa fabrication, qui lui permettent de déposer un fin et vigoureux trait noir et des couleurs à l’huile transparentes et légères. Foujita remet en vigueur un second japonisme. Ses tableaux de femmes, d’enfants et de chats entrent dans les plus grandes collections.

En 1925, il est nommé chevalier de la Légion d’honneur en France. C’est sans doute l’un des artistes les mieux rétribués de l’époque. Il est envié et inconscient de l’ampleur de sa réussite. Celle-ci lui attire en 1928 un lourd redressement fiscal qui va bouleverser sa vie. Afin d’aller y vendre ses œuvres, il retourne à Tokyo avec Youki après dix-sept ans d’absence et après avoir répudié sa première fiancée. Il doit diminuer son train de vie, vendre maison et voiture et perd Youki, follement éprise de Robert Desnos. Après avoir tenté l’expérience d’une vie à trois, Foujita ne voit qu’une issue possible, quitter Paris.

Il part fin décembre 1931 avec son modèle, Madeleine, pour un voyage extraordinaire de deux ans en Amérique latine. Il se contente de laisser une lettre d’adieu à Youki et de recommandation à Desnos. Madeleine, dite Mady Dormans, l’aide à surmonter ses déboires et leurs découvertes, Brésil, Argentine, Colombie, Pérou, Mexique et Californie, lui redonnent goût à la vie et à la peinture. Au Brésil, il est accueilli à Rio de Janeiro, en octobre 1931, par le peintre Candido Portinari. Le couple vit du fruit des expositions et arrive à Tokyo le 16 novembre 1933. Il y est accueilli comme une vedette et, très vite, organise à la Galerie Nichido une succession d’expositions. Il devient alors membre de Nikakai et réalise de grandes peintures murales. Madeleine meurt soudainement d’une overdose à Tokyo en juin 1936. Il fait la connaissance d’une jeune Japonaise, Kimiyo Horiuchi, auprès de qui il trouve le réconfort. En 1938, Foujita se rend en Chine avec d’autres peintres, comme Ryōhei Koiso, en tant que peintre attaché aux armées en guerre.

Il séjourne à nouveau à Paris de 1939 jusqu’à l’arrivée des Allemands en mai 1940. De 1939 à 1945 il travaille à des œuvres et des expositions de peintures de guerre. Sa collaboration au militarisme japonais, puis avec les Américains, sera à l’origine de critiques à l’Après-Guerre.

Sur son action dans l’armée impériale japonaise pendant cette période, l’historien J.-L. Margolin écrit que « figure de proue des peintres de guerre, il n’avait jamais manifesté le plus petit doute, même en privé, quant à la justesse de la cause impériale ». Une organisation japonaise précisant même en 1946, que Foujita « collabora de la façon la plus active et la plus énergique avec l’armée au travers de son travail artistique. S’investit par écrit dans la propagande militariste. Voix écoutée dans le monde de l’art, comme dans la société, il eut un rôle important dans les mouvements militaristes et une influence extrêmement forte sur l’ensemble du peuple ». Cela ne l’empêcha pas d’être, dès 1945, « le principal collaborateur des Américains dans le domaine de l’art […] de rassembler pour eux des peintures de guerre, sans se priver au passage de placer certains de ses propres tableaux dans les meilleures collections américaines».

Seul son départ définitif du Japon pourra l’apaiser. Après une attente de trois années pour obtenir un visa, Foujita s’envole pour New York en 1949, protégé par le général MacArthur. Kimiyo, celle qui sera sa dernière épouse, le rejoint quelques semaines plus tard. Les peintures qu’il expose à la Galerie Komor à New York demeurent parmi ses chefs-d’œuvre, dont Au Café (Paris, musée national d’art moderne).

Le 14 février 1950, Il retrouve Paris et s’installe avec Kimiyo de nouveau à Montparnasse, renouant avec ses anciens marchands et le succès. Paul Pétridès, Romanet et Jeanne Jarrige-Bernard sont ses principaux marchands. Ils lui organisent des expositions en Algérie, au Maroc et en Espagne. Son ami Georges Grosjean, journaliste, et Victor Berger-Vachon l’aident dans sa nouvelle carrière. Il repart à zéro à Paris. Il mène une vie calme, laborieuse, sereine et retirée du monde. Il se rend régulièrement à la cité Falguière pour dîner chez son ami Tadashi Kaminagai, qui, sur sa recommandation, s’était installé pour quelques années au Brésil en 1941 et y avait rencontré le succès.

En 1955, il obtient la nationalité française.

Il se convertit au catholicisme le 14 octobre 1959, après avoir connu, en compagnie de son ami Georges Prade, une illumination mystique en visitant la basilique Saint-Remi, à Reims. Sa marraine est Béatrice Taittinger, son parrain René Lalou ; il prend le prénom baptismal de « Léonard », en l’honneur du bienheureux Léonard Kimura, l’un des martyrs du Japon. Le prénom évoque aussi l’amour qu’il voue à l’art de Léonard de Vinci.

Il achète en 1960 une petite maison à Villiers-le-Bâcle, dans la vallée de Chevreuse, où il aspire à une retraite mystique et artistique avec sa femme, recevant seulement de très bons et vieux amis.

En 1964, il décide avec René Lalou — son parrain, qui dirigeait la maison de champagne Mumm —, de bâtir et décorer une chapelle à Reims : la chapelle Notre-Dame-de-la-Paix, dite chapelle Foujita, commencée en 1965, et terminée en 1966. Cest son dernier grand chantier : réaliser les fresques de cette chapelle en étroite collaboration avec l’architecte rémois Maurice Clauzier.

Léonard Foujita meurt d’un cancer le 29 janvier 1968, à Zurich, en Suisse. Après avoir été inhumé à Reims, puis exhumé pour le cimetière communal de l’église Notre-Dame de l’Assomption de Villiers-le-Bâcle (Essonne), sa dépouille mortelle repose à nouveau (depuis le 6 octobre 2003) dans la chapelle Foujita à Reims, auprès du corps de sa dernière épouse qui l’a rejoint en 2009.

Référence : Biographie Foujita Wikipédia